Exposition du 16 mai 12 juin 2015
Vernissage le 16 mai à 16h
Finissage le 12 juin à 18h
"Au début du siècle passé, Romeo Zanzi, mon aïeul, disparut au Brésil. Il ne laissa de trace qu'une dizaine de lettres et quelques photographies. Sur une de celles-ci, un petit homme insignifiant posant entre deux costauds semble traduire la condition du migrant, déraciné et fragile. Des montagnes de Château-d'Oex où je suis né, le naturaliste Henri Pittier se rendit, un siècle auparavant, dans les forêts denses du Costa Rica. On lui connaît quelques clichés. Je l'imagine scrutant la flore et observant l'apparition fugace d'une faune inconnue s'arrêtant momentanément à l'intérieur du cadre, avant de reprendre son itinéraire. De façon analogue, j'entrevois, dans la statique du tableau, une narration de l'être humain comme autre inapprivoisé, en attente ou migrant."
Michael Rampa recherche une transcription de la réalité sans recourir à la copie d'une photographie. Il part de traces et de taches pour imaginer des lieux au sein desquels apparaissent parfois des êtres isolés. Ceux-ci proviennent d'esquisses d'après modèle et sont parfois répétés dans différents tableaux ou dessins.
Le processus de réalisation s'apparente à une forme hybride d'expressionnisme abstrait et de classicisme figuratif. Le travail se retrouve dès lors en équilibre instable entre le plan du tableau et l'illusion de l'espace inventé.Tandis que les peintures adoptent généralement un recouvrement all-over, les dessins s'apparentent le plus souvent à des fragments. Mais dans un cas comme dans l'autre, l'idée d'un cadrage préside à la réalisation. Ainsi, ce qu'observent les quelques figures qui peuplent ces tableaux, dans ce hors champ qu'ils ont en commun avec le spectateur, peut aussi être perçu par ce dernier. Sans doute l'enjeu oscille-t-il au seuil de cet invisible.
Florian Javet développe depuis plusieurs années un travail graphique par lequel il examine les caractéristiques structurelles du dessin. Il accorde une attention particulière aux variations d'échelles et à la perte ou mutation d'information inhérente à certains traitements mécaniques. Il soumet par exemple son travail aux interprétations d'une photocopieuse A3. Ainsi, telle trace minuscule et précise exécutée à la main sur le coin d'une feuille s'hérisse-t-elle en une entité méconnaissable et n'apparaissant qu'en partie sur la feuille, après qu'elle ait été plusieurs fois agrandie par la machine. L'artiste ne se contente pas de constater ces résultats, mais procède à une nouvelle intervention manuelle à même la reproduction. Il répète ensuite l'opération d'agrandissement et ainsi de suite.
En découle une conversation interminable entre, d'une part, l'intelligible d'une intention manuelle lisible, de la grille ou de la case comme éléments graphiques permettant d'indexer des contenus et, d'autre part, une sorte d'hypertrophie vertigineuse évoquant certains enjeux liés à l'impossibilité technologique actuelle de gérer le flux des données.
Léonore Thélin recherche par le geste à composer des scènes réalisées à partir d'observations et d'impressions diverses : le clapot après l'orage, un homme saisissant une branche ou l'allure caractéristique d'un visage perçu à mi-chemin entre le rêve, la vie et le cinéma classique. Les séquences et espaces picturaux auxquels elle donne corps sont souvent elliptiques, les vides ou les détails se faisant l'écho de sensations insaisissables.
À l'occasion du vernissage, les Éditions Ripopée présentent leurs quatre dernières publications:
"Accrochée à la luette" de Léonore Thélin
"-…" de Florian Javet
"The Sitting" de Michael Rampa
"A Book produced by Chance and a little Degree of Design" conçu par les trois artistes
"An artificial blot is a production of chance, with a small degree of design; for in making it, the attention of the performer must be employed on the whole, or the general form of the composition, and upon this only; whilst the subordinate parts are left to the casual motions of the hand and the brush."
Extrait de la "Nouvelle méthode pour assister l'invention dans le dessin de compositions originales de paysages" d'Alexander Cozens (1717-1778).
